COMMENT DEVENIR OBLAT BÉNÉDICTIN ?

Sans doute lorsque, au contact d'une communauté monastique bénédictine, on entend un appel pressant à s'offrir à Dieu, à faire de sa vie de chrétien vivant dans le monde « une vivante offrande à la louange de sa gloire », les circonstances dans lesquelles cet appel retentit sont toujours singulières : « Qu'il s'agisse d'un coup de foudre ou d'une lente maturation, ce sera toujours un long chemin de conversion pour le baptisé touché par la grâce et le don de Dieu » (Père Bernard Ducruet osb).
Le premier temps est un temps d'approche du monastère ou de l'abbaye, très variable dans sa durée et ses modalités. Il s'agit de fréquenter « cette » communauté monastique en qualité d'hôte, et d'y trouver un lieu-source qui éveille un désir de grandir en sainteté dans la vie concrète et quotidienne selon la règle de saint Benoît.
Une première connaissance de l'oblature se fait par la rencontre d'un moine ou d'une moniale, dans le cadre d'entretiens ou d'accompagnement spirituel ; des livres peuvent y aider. Si l'appel à l'oblature est vérifié de part et d'autre, s'ouvre alors le temps de la formation. Il peut être marqué par un rite d'entrée en oblature pendant lequel la personne formule sa demande.
La période de formation - dont la durée est variable, notamment selon les possibilités de fréquentation du monastère - est un temps d'initiation à la règle de saint Benoît comme chemin d'Évangile et un temps de discernement : il s'agit de vérifier la capacité du futur oblat à percevoir les valeurs évangéliques de la règle et à les incarner dans une vie séculière de « fidèle du Christ » dans sa famille, son travail, ses engagements. La formation se fait le plus souvent individuellement, mais aussi dans le cadre du groupe des oblats du monastère où les nouveaux venus font l'expérience d'appartenir à la famille monastique.
Le cheminement s'achève par la liturgie de l'oblation. Elle se fait de préférence au cours de l'Eucharistie qui rassemble toute la communauté et les hôtes, pour souligner l'union du postulant ou de la postulante à l'offrande du Christ et de l'Église. L'oblat lit publiquement sa charte d'oblation qui l'engage à servir le Christ dans un effort persévérant de conversion évangélique, à l'école de la règle de saint Benoît et en communion avec les frères ou les sœurs de son monastère. La prière traditionnelle du « Suscipe » associe désormais moines ou moniales et laïcs oblats - gens du cloître et gens des rues - dans le même désir de « Ne rien préférer à l'amour du Christ. »

L'OBLATURE BÉNÉDICTINE

On s'est parfois demandé s'il y avait des Oblats au temps de S. Benoît. Il est certain que le terme d'Oblats fut primitivement réservé aux enfants offerts au monastère, ainsi que nous l'apprend le chapitre LIX. Mais il n'est pas moins certain qu'il exista dès le début, dans l'entourage des monastères, des âmes désireuses de perfection, unies aux groupes cénobitiques par un mode plus ou moins précis d'affiliation. Plusieurs de ces chrétiens ou chrétiennes appartenaient à l'ancienne institution des « ascètes », fidèles vivant dans le monde, souvent au milieu de leurs familles, conformément à cet idéal de la primitive église dont le P. Dom Germain Morin a montré l'étroit rapport avec l'idéal monastique. Il y avait encore, ainsi que l'a remarqué 'le R. P. Dom. U. Berbère, des ascètes de cette pre­mière manière au VIIe siècle. La Vie de S. Benoît, par S. Grégoire-le-Grand, nous montre ainsi, non loin du Cassin, « deux femmes religieuses de noble famille qui « vivaient chez elles avec leur nourrice », et dont un homme de bien assurait la subsistance. Elles appartenaient à une église séculière où elles recevaient la communion et cependant S. Benoît les excommunie pour un manque de charité à l'égard de leur bienfaiteur, comme s'il avait sur elles une certaine autorité. Dans un autre chapitre, c'est le frère du moine Valentinien, « laïque, mais pieux » qui, chaque année, vient au monastère refaire sa provision de forces spirituelles. Il est comparé au « disciple » du prophète Elie, et S. Grégoire nous apprend « qu'il avait « coutume de venir à jeun de chez lui au monastère de « Benoît ». Il semble bien que cette pratique lui avait été prescrite par le Saint lui-même, car un jour qu'il y avait manqué, « le saint homme lui reprocha aussitôt ce qu'il « avait fait en route », et lui, tout confus, se jeta aux pieds de Benoît, « pleurant sa faute et rougissant d'au‑« tant plus qu'il reconnaissait que, même absent, il avait « péché sous les yeux de l'Abbé ».


Par ailleurs, autour du monastère, vivaient des ouvriers employés aux travaux des champs. S. Benoît suppose leur présence, lorsqu'il dit, au chapitre XLVIII, que, dans les monastères pauvres, les moines peuvent se trouver obligés de faire eux-mêmes la moisson. Preuve que dans les monastères plus fortunés, ce soin était confié à d'autres. Or les moines étaient loin d'être indifférents à la formation religieuse de ces modestes collaborateurs, eux qui, à l'imitation de leur Bienheureux Père, s'efforçaient d'amener à Dieu les villageois de leur voisinage. S'il y avait chez les -fidèles une attraction vers le monastère, il y avait sûrement par contre chez les Moines un besoin d'assimilation qui est déjà une forme de l'apostolat. Un érudit oblat, M. l'abbé Deroux a montré, dans sa substantielle étude sur les Origines de l'Oblalure que les ouvriers du 'monastère, devenus des famuli finirent, avec l'évolution du travail monastique, par se transmuer progressivement en religieux, sous le nom de « frères convers ». Mais leur situation primitive était véritablement celle d'oblats séculiers vivant dans l'atmosphère du monastère et sous la direction spirituelle des religieux, sous des statuts parfois fort imprécis.
A côté de ces famuli, nous voyons, dès le VIIe siècle, des laïques, hommes et femmes, s'adjoindre aux monastères, sous certaines conditions, à titre d'hôtes permanents. Ils sont soumis à l'Abbé, dont ils s'emploient à réaliser les desseins au dehors de la maison. Ils font en général entre ses mains un abandon partiel ou total de leurs biens en retour du logement, du vêtement et de la nourriture. Lorsqu'ils renoncent à leur liberté, ils prennent le nom d'oblats et portent un habit qui ressemble à celui des moines.
Tous ne résident pas cependant au monastère ; quelques-uns restent dans le monde où les retient leur situation. Ces deux catégories de résidants et de non-résidents apparaissent nettement au IXe siècle. On sait comment, au XIe siècle, Guillaume, Abbé d'Hirschau, organisa les oblats de son abbaye et leur donna des Constitutions qui provoquèrent l'admiration des contemporains.
Mais à côté de ces cas nombreux d'union, d'autres se présentent où les liens de fraternité semblent surtout spirituels. C'est le cas des « fratres » ou « sorores familiales ». Princes, évêques, chevaliers, inscrits à la matricule (les monastères, sont unis par un lien religieux aux moines qui les considèrent comme « frères » et « sœurs ». Mais, selon les personnes et les lieux, la filiation apparaît plus ou moins étroite et impliquant plus ou moins d'obligations.
En certains cas, elle ne dépasse guère évidemment une simple union de prières et de mérites, mais, en d'autres, elle est plus que cela. Parfois la réception a lieu au chapitre. L'oblat est « reçu en frère ». Parfois on lui donne un habit monastique, qu'il portera sous ses vêtements ou qu'il revêtira en certaines occasions. Guichard, abbé de Pontigny, revêtit S. Thomas Becket, archevêque de Can­torbéry, d'une coule dont on avait diminué le capuce et rétréci les manches, afin qu'il la pût porter constamment, en la dissimulant. A Guillaume Longue Épée, duc de Normandie qui voudrait se faire moine, Martin, Abbé de Jumièges donne aussi une coule et une tunique que le prince dépose dans un coffre dont il porte toujours la clef et sans doute le duc les revêt en certaines circonstances. L'Abbé Dubois, rapportant l'histoire de l'abbaye de Morimond au milieu du XIIe siècle, nous dit que beaucoup de prêtres, impressionnés par la vie des moines et ne pouvant résister à de si touchants exemples, regardant comme le plus grand bonheur d'être affiliés à l'ordre, se faisaient raser la tête, prenaient le costume monastique et suivaient autant qu'ils pouvaient la règle bénédictine dans leurs demeures.
C'est sans doute l'usage déjà ancien de donner l'habit monastique ou une partie de cet habit aux chrétiens affiliés à l'ordre, mais qui ne pouvaient entrer au monastère, que s'inspira S. Norbert lorsqu'il revêtit d'un scapulaire de laine blanche le Comte Thibaut de Champagne, le premier de ses Tertiaires. Plus tard, S. François d'Assise ne croira pas innover en donnant la bure franciscaine à Luchesio et à Bona Donna, mais bien plutôt en leur donnant une règle qui constituait un ordre, complet en soi et vivant dans le monde.
Nous avons au IXe siècle, en la personne de Géraud d'Aurillac l'exemple d'un laïque grand seigneur, menant, sous la conduite de l'évêque Gaubert, la vie religieuse dans le siècle. S'il n'est pas pour lui question d'habit, on nous apprend du moins qu'il s'était fait donner la tonsure monastique qu'il dissimulait « sous les flots du reste de sa « chevelure », et que, chaque jour, il récitait l'office au milieu des clercs.


L'histoire de S. Henri, empereur, est bien connue. Comme le prince supplie Richard abbé de S. Vanne, de le recevoir comme moine, celui-ci le fait venir au chapitre, et lui pose cette question : « Voulez-vous, suivant la Règle et suivant l'exemple de Jésus-Christ, être obéissant jusqu'à la mort ? » Sur la réponse affirmative du « postulant », l'Abbé poursuit : « Moi, je vous reçois pour moine et, dès ce jour, je me charge du soin de votre âme. C'est pourquoi je veux que vous fassiez, avec la crainte de Dieu, tout ce que je vous ordonnerai ». L'empereur ayant de nouveau acquiescé : « Je veux donc, déclare l'Abbé, que vous retourniez gouverner l'empire que Dieu vous a confié et que, par votre fermeté à rendre la justice, vous procuriez, selon votre pouvoir, le salut de tout l'état. »
Durant sa vie, l'oblat restait, autant qu'il le pouvait, sous la direction des moines. S. Henri consultait fréquemment l'Abbé Richard.
Certains oblats, comme Bouchard le Vénérable, comte de Vendôme, à Saint-Maur-des-Fossés, viennent se fixer près de l'abbaye, afin de pouvoir prendre part à la psalmodie des moines. Pour les femmes, la chose est assez commune. Logées dans des cellules, à proximité du monastère, elles occuperont les intervalles des offices, à l'entretien ou au lavage des vêtements des moines ou la confection des ornements d'église. Ainsi faisaient, à l'abbaye du Bec, en Normandie, la mère du bienheureux Herluin, le fondateur, et plus tard Basilis, veuve de Hugues, Amfride, sa nièce et Ève, veuve de Guillaume Crespin. On cite, au prieuré du Désert, dépendant de N.-D. de Lyre, Helsende, femme de Gilbert de Terray ; à Lessies, Ada, veuve de Thierry d'Avesnes, Pétronille, veuve de Raoul, comte de Vies-ville, etc. On pourrait considérablement allonger la liste. Ces saintes femmes recevaient « l'habit de religion » ou tout au moins le voile. Certaines étaient filles, d'autres veuves, quelques-unes mariées, telle Hélisende, citée plus haut, pour laquelle son mari fonda des messes, rappelant qu'elle avait vécu « comme soeur », près le prieuré du Dézert. L'influence de ces oblates était parfois profonde. Le moine chroniqueur de Lessies nous dit que l'oblate Ada était « la gardienne de la ferveur religieuse de l'abbaye ».
A l'heure de la mort, l'oblat séculier était souvent revêtu de l'habit monastique et, à l'exemple des moines, il expirait sur la cendre. Plus souvent encore, il en était revêtu après sa mort et inhumé dans le cloître, ainsi qu'il avait été stipulé, lors de sa réception. On lui faisait un obit et on lui accordait des suffrages, comme aux membres de la Communauté.
Grâce à Ste Françoise Romaine, un groupe d'oblates est demeuré célèbre au XIVe siècle ; c'est celui qui s'était formé, à Rome, autour du monastère de Ste-Marie-la-Neuve, desservi par la Congrégation bénédictine du Mont-Olivet. Après avoir été le modèle des épouses et des mères, Françoise, devenue veuve, s'est retirée avec quelques dames pieuses, dans la maison de Tor-de-Spechi qu'elle avait fait bâtir du vivant de son mari. Les « sœurs », sans aucun vœu, suivent la Règle de S. Benoît, adaptée à leur situation par Dom Antonello di Monte-Savelli. Elles portent un voile de laine blanche sur une modeste robe noire. « Françoise, écrit Dom B. Maréchaux, dirige admirablement son petit troupeau. C'est une âme tout d'une pièce, n'ayant que Dieu pour but et allant droit à Lui comme une flèche. Vivant en rapports constants avec Dieu et ses Saints, l'admirable mystique n'en est pas moins une ardente apôtre. Elle mène une lutte sans répit contre les modes licencieuses. Elle se dévoue pour les malades et les pauvres, et au milieu d'œuvres multiples et semant le miracle sous ses pas, elle est entrée jusqu'au fond dans cet abîme de l'humilité et de l'obéissance creusé par S. Benoît. Elle s'est remplie jusqu'au bord de cet esprit de componction qui est le nerf de la prière bénédictine... »
La décadence monastique des XVe et XVIe siècles devait amener celle de l'oblature. Cependant elle n'était pas tout à fait oubliée au XVIIe siècle. L'Abbé Duquesne écrivant alors la vie de la vénérable Mecthilde du S. Sacrement faisait cette réflexion : « C'était une dévotion fort en usage autrefois de prendre l'habit de certains ordres religieux pour lesquels on avait quelque attrait... On ne quittait ni son état ni même les vêtements convenables à son état. On se contenta de porter sous les habits ordinaires quelque marque ou symbole de l'ordre qu'on avait choisi ». Mais, poursuit-il, « cette dévotion si estimée et si révérée autrefois n'était plus que l'objet de la censure et des railleries du monde ».
Le XVIIe siècle a connu quelques grandes oblates. La plus célèbre fut Hélène Lucrèce Cornaro-Piscopia, de l'une des plus illustres familles de Venise.


 Prodige d'érudition, mais aussi de piété et de mortification, elle se consacra secrètement au Seigneur à 11 ans. Passionnée pour la liturgie, elle assistait chaque jour aux offices de l'abbaye de S. Jacques. Un peu plus tard, elle renouvela son vœu et reçut, à titre d'oblate, le grand scapulaire bénédictin qu'elle ne cessera de porter sous ses vêtements séculiers. Dom Mabillon, parcourant l'Italie, ne manqua point d'aller la visiter. Elle devait mourir à 32 ans. Son corps, revêtu de l'habit de l'Ordre, repose, à Ste-Justine de Padoue, dans la chapelle réservée à la sépulture des moines.

A la même époque, la Mère Mecthilde du S. Sacrement recevait à l'oblature la comtesse de Châteauvieux. Nous connaissons par l'Abbé Duquesne les détails de la vêture qui eut lieu, dans la nuit, après Matines, et le même auteur nous a conservé la petite allocution adressée par la « Vénérable Mère » à la nouvelle oblate, lorsqu'elle eut revêtu la tunique, la ceinture de cuir, le scapulaire et le voile.
L'oblature devait suivre, au XVIIIe siècle, les destins de l'Ordre monastique et agoniser avec lui. Elle sera relevée, au XIXe siècle par le grand moine qui restaura en Fiance l'ordre de S. Benoît, Dom Prosper Guéranger, premier abbé de Solesmes. Ses pensées sur cet objet ont été réunies dans un petit opuscule intitulé : L'Église ou la Société de la Louange divine. Plus tard l'Oblature fut révélée au grand public par un célèbre oblat de Ligugé, l'écrivain Huysmans dont le livre l'Oblat n'a pas été sans influence sur la progression de l'oblature. Depuis elle n'a cessé de prospérer et d'être un instrument efficace de rénovation chrétienne dans une société aux trois quarts paganisée. En 1898, S. S. Léon XIII, dans un bref du 18 juin avait fixé les privilèges des Oblats bénédictins. En juillet 1904 S. S. Pie X, sur la demande du Révérendissime Abbé Primat de l'Ordre, Dom Hildebrand de Hemptine, approuvait et confirmait leurs statuts. Désormais les Oblats bénédictins ont dans leur Ordre et dans l'Église une situation juridique.



FRANCHIR LE PAS : L'OBLATION...


Se sentant en harmonie avec la Règle de saint Benoît, et conscients que Dieu les appelle à vivre l'Évangile selon l'esprit bénédictin, ces chrétiens décident de s'engager par une promesse prononcée devant Dieu et agréée par l'Église. Ils s'offrent à Dieu en présence d'une communauté qu'ils ont choisie et qui les a acceptés, et dont en retour ils attendent aide et prière pour rester fidèles. « C'est avec cette famille monastique choisie qu'ils vivront l'unique Évangile et réaliseront le dessein de Dieu sur eux. » En effet, le mot oblat signifie offert et oblation signifie offrande, l'oblat est quelqu'un qui s'offre à Dieu. L'engagement dans l'oblature, c'est-à-dire comme oblat, n'implique aucune situation particulière, sinon une maturité suffisante. En paraphrasant la Lettre à Diognète (écrit anonyme du IIe siècle) on peut écrire que les oblats « ne se distinguent des autres hommes ni par les vêtements, ni par le pays, ni par la langue... et leur genre de vie n'a rien de singulier. » Prière d'oblation ACCUEILLE-MOI, SEIGNEUR SELON TA PAROLE, ET JE VIVRAI. NE ME DEÇOIS PAS DANS MON ATTENTE. (Psaume 118, v. 116) Accueille-moi, Seigneur, tel que je suis, tel que tu m'as façonné dès le sein de ma mère. Reçois-moi parce que je frappe à la porte. Je t'appelle, réponds-moi. Accueille-moi, avec mes faiblesses, avec mon passé. Accueille aujourd'hui le don que je fais de moi-même. Reçois-moi demain et après-demain ; même si moi je t'oublie, car toi tu ne m'oublies pas ! Accueille-moi, selon ta parole. Ta Parole fait ma joie et les délices de mon cœur. Ta Parole me transforme. Mets sur mes lèvres ta Parole de vérité. Ne me reprends pas ton esprit saint, que ton esprit me guide et me conduise. Si tu me reçois, je vivrai. Accueille-moi pour que je vive en ta présence, pour que je m'efface devant l'immensité de ton amour. Accueille-moi pour que je puisse te contempler. Tu me reçois dès ici-bas pour que je vive de ta Parole, de ton Corps et de ton Sang. Alors, j'en suis sûr, tu ne décevras pas mon espérance. Si tu me reçois, je vivrai. Accueille-moi pour que je vive en ta présence, pour que je m'efface devant l'immensité de ton amour. Accueille-moi pour que je puisse te contempler. Tu me reçois dès ici-bas pour que je vive de ta Parole, de ton Corps et de ton Sang. Alors, j'en suis sûr, tu ne décevras pas mon espérance. C'est avec sa famille, ses compagnons de travail, sa paroisse, ses relations sociales diverses que l'oblat doit cheminer en vue du Royaume, répondant à sa « vocation propre qui consiste à chercher le règne de Dieu à travers la gérance des choses temporelles et à travailler comme du dedans à la sanctification du monde » (Lumen Gentium), en se mettant au service de ses frères.


Ma demande d'entrée en "noviciat d'oblature" en juin 2012.



Entrée au noviciat d'oblature de la communauté des moines bénédictins de l'abbaye N.D. Du Bec-Hellouin de Roger François
Le samedi 23 juin 2012.
Messe monastique de 11h45'

Entrée des moines en procession et regroupement autour de l'autel.
Petit mot du R.P.Abbé Dom Paul-Emmanuel...
Devant la communauté des moines et l'assemblée le R.P. Abbé Dom Paul-Emmanuel s'adresse à Roger et demande:
Que demandez-vous ?

Roger répond:

Devenir oblat de votre communauté.

Dom Paul-Emmanuel à Roger:

Que recherchez-vous dans l'oblature ?

Roger répond:
A vivre ma vocation de baptisé, rechercher, suivre et aimer le Christ à la lumière de Saint Benoît et en lien avec votre communauté.
Dom Paul-Emmanuel à Roger:
Voulez-vous vous employer, durant l'année à venir, à vous imprégner de l'esprit de Saint Benoît et à y conformer votre vie ?
Roger répond:
Oui, je le veux, avec la grâce de Dieu!
Dom Paul-Emmanuel:
Que le Christ vous guide sur ce chemin de vie !
Roger répond: Amen.


Ma demande d'oblation le 8 juin 2013.

Depuis la fin de l'Antiquité, et encore dans le catholicisme actuel, un oblat (du latin oblatus « offert » et oblatio « don ») est un laïc qui est donné ou se donne à un monastère qui l'accueille pour lui permettre de vivre certains aspects de la vie et de la spiritualité monastique. 

Apéritif offert par les frères à l'occasion de mon Oblation

Etre oblat...

L'oblat prie donc en communion avec son monastère grâce à l'office divin que Benoît appelle « l'œuvre de Dieu » : chaque oblat suit la Liturgie des Heures de l'Eglise, selon ses possibilités.

La Lectio Divina (ou Lecture de la Parole de Dieu) est également un moment important dans la vie d'un oblat, puisque ce dernier est avant tout un « chercheur de Dieu ». Elle débouche naturellement sur la rencontre de Dieu dans l'oraison.

Chaque jour, l'oblat lit et médite la Règle. Il s'en pénètre, il l'assimile au point qu'elle est dans sa mémoire au moment de prendre telle ou telle décision. Elle devient chemin d'intériorité.

Le lien d'un oblat avec son monastère se traduit par des visites, des retraites, des réunions d'oblats qui sont généralement des temps forts de formation, des courriers, des bulletins.


Unis au Christ, unis en Christ

Engagés dans la vie familiale, professionnelle, associative, ecclésiale, ils sont sensibles à la sagesse millénaire de cette Règle bénédictine qui propose de chercher Dieu par cette voie de ce qu'il y a de plus humain dans l'homme.

En se mettant à son école, ils y trouvent les outils d'un art spirituel fait d'écoute de la Parole de Dieu, de recherche de la paix intérieure, du goût de la prière et du travail bien fait, d'apprentissage du don de soi et des relations humaines, du souci des plus faibles...

Si dans leur milieu de vie, les oblats bénédictins témoignent que la quête de Dieu rend plus humain, ils rappellent aussi à la communauté monastique qui les accueille que cette quête la rend solidaire de tout homme.

Dans notre Congrégation, on distingue :
- les oblats vivant dans la Communauté
- les oblats vivant en dehors de la Communauté


- Les oblats vivant dans la Communauté sont ceux qui, sans vouloir devenir moines, s'offrent à Dieu et, demeurant dans le monastère, avec nous, prient, travaillent et pratiquent les vertus monastiques.

Ils font oblation et sont oblats de la Communauté. Selon leur désir, ils peuvent porter soit l'habit monastique (excepté la coule), soit l'habit laïc.

- Les Oblats vivants en dehors de Communauté sont des hommes ou des femmes ou encore des prêtres, qui, tout en vivant dans leur famille et dans le monde, trouvent dans la Règle de Saint Benoît un programme de vie spirituelle qui les pousse à approfondir, à l'aide de l'oblation, leur consécration baptismale et l'appel universel à la sainteté.

Ils sont régis par des statuts particuliers, propres à chaque monastère, mais tenant compte des normes approuvées par la Congrégation des Religieux et Instituts Séculiers, pour les oblats séculiers bénédictins.

Chaque Communauté exprime sa fécondité spirituelle en suscitant l'association au monastère d'oblats et d'oblates.

Pour plus d'information sur le parcours d'oblature, vous pouvez contacter le Frère Jean Marie :           frere.jean-marie@abbayedubec.org



Texte de Dom Prosper Guéranger, ancien Abbé de l'abbaye St. Pierre de Solesmes.

Dom Guéranger est à l'origine du rétablissement de l'oblature dans l'Ordre de saint Benoît après plusieurs siècles d'interruption. Cette oeuvre a accompagné celle de la restauration de la vie bénédictine au 19ème siècle. Dom Guéranger était très convaincu de son utilité et a pris le temps de réfléchir à ce projet avec une grande prudence face aux évènements que la Providence a suscité en ce sens.
Il est important, dans un premier temps de revenir sur les sources de cette institution séculaire de l'oblature. Elles posent les bases d'une association entre les fidèles laïcs et les moines regroupés en communauté. Cette question reste d'actualité. Il sera utile de tirer les leçons de l'histoire et de l'intuition de Dom Guéranger, pour imaginer une progression dans l'association des laïcs à la vie monastique aujourd'hui.
I. La Règle de Saint Benoît
Le chapitre 59 de la Règle de saint Benoît (en abrégé RB dans ce texte) règlemente l'oblature des enfants qui sont présentés au monastère par leurs parents. Il y est décrit le rite de la déposition de la pétition rédigée par les parents avec l'offrande (celle du pain et du vin pour l'eucharistie) enveloppées avec la main de l'enfant dans la nappe, sur l'autel. Les enfants concernés ne portent pas directement le titre d'oblats et ce terme n'est en fait mentionné nulle part dans la Règle. C'est un véritable engagement monastique qui vise à assurer la stabilité de ceux qui se lient ainsi à la vie du monastère et qui ne peuvent revenir sur cet engagement à l'âge adulte. Sur ce point, la RB est plus sévère que d'autres règles antérieures ou contemporaines.
II. Jalons historiques
Notre propos concernant l'oblature séculière des adultes ne trouve donc pas son origine dans ce chapitre de la RB. C'est au XIème siècle que l'on voit apparaître dans les Congrégations d'Hirshau en Allemagne et de Cluny en France, des oblats adultes. Selon les propos de dom MP. Deroux, abbé de Ligugé en 1927, il semble que « la cause principale de l'introduction des frères convers et des oblats dans les monastères doive être cherchée dans la désaffection des moines pour le travail manuel ». L'investissement liturgique, notamment dans la Congrégation de Cluny, ne permettait plus le même rendement des moines dans les activités de travail manuel. L'introduction de famuli pour aider les moines dans leurs activités ordinaires est très probablement à l'origine du recrutement des oblats, sans être la seule. Les noms donnés à ces laïcs se joignant à la communauté monastique sont très variés : oblati, familiarii, fratres conscripti, laici conversi, prebendarii, donati, etc. et dénote des origines diverses. A Hirshau, au XIème siècle et dans la suite, « tous les laïcs vivent dans la clôture ou dans ses alentours. Ils sont vis-à-vis du monastère, dans une certaine dépendance et un lien religieux à peu près semblable les rattache sans qu'aucun d'eux ait un statut précis. » L'Abbé Guillaume d'Hirshau est à l'origine d'une première élaboration d'un statut pour tous ces laïcs joints au monastère. La relation de l'oblat au monastère reste souple : il fait don d'une partie ou de tout ses biens à la communauté ; il fait don de sa personne par une promesse d'obéissance à l'Abbé. Il est considéré comme faisant partie de la famille monastique. Mais l'Abbé peut le relever de sa promesse d'obéissance. Souvent le monastère confie des charges matérielles ou administratives à ces laïcs qui sont souvent des notables. Cette institution perdurera jusqu'au XVIème siècle. Elle perd progressivement toute vitalité avant de renaître sous une nouvelle forme au XIXème siècle.
III. L'oblature dans la Congrégation de France
L'histoire de la restauration de l'ancienne institution des oblats dans l'Ordre bénédictin au XIXème siècle est complexe. Nous ne voulons en donner ici le détail, mais simplement insister sur quelques dimensions de cette restauration pour alimenter notre réflexion présente. Un premier état du lien entre des laïcs et les monastères de la Congrégation de France se fit sous le mode de l'affiliation telle qu'elle se pratiquait dans d'autres ordres comme celui des Trappistes. Cette pratique était essentiellement spirituelle : elle assurait les personnes qui en bénéficiaient des prières du monastère à leur intention souvent comme un signe de reconnaissance.
Les premiers oblats, au sens où nous l'entendons aujourd'hui, firent leur apparition en 1868. Ils sont appelés à s'inspirer de la Règle de saint Benoît, mais aussi des écrits de sainte Gertrude, et à suivre le calendrier bénédictin, spécialement pour les jours de solennités. Pourtant Dom Guéranger avait en tête un projet plus développé qu'il ne put jamais proposer dans toute son ampleur. L'expérience d'un lien privilégié entre le monastère de Sainte-Madeleine de Marseille et des prêtres du diocèse qui souhaitaient se structurer en confrérie invite Dom Guéranger à préciser que pour lui, l'oblature n'est en rien semblable à un tiers-ordre. Sur l'insistance maintes fois répétée de dom Le Menant des Chesnais, Prieur de Sainte-Madeleine, quelques temps avant sa mort, Dom Guéranger dicte une petite Règle pour les oblats en 1874. Ce texte vient d'être publié dans le Bulletin des Amis et Oblats de l'Abbaye Sainte-Marie de Paris. Dom Guéranger ne voit dans cette Règle qu'une ébauche d'un écrit plus important. Il disait lui-même à ce sujet : « Je veux quelque chose de grand, de solide, de beau, qui procure la gloire de Dieu » (lettre à Dom Gauthey, en 1974). Ce qui est le plus caractéristique dans cet écrit comme en bien d'autres de Dom Guéranger, c'est la largeur de vue du propos. Il ne s'agit pas de copier la vie monastique, mais d'être authentiquement chrétien « en s'appuyant sur les moines qui ne sont en réalité que des chrétiens parfaits attachés uniquement au Christ ». Le terme de « parfaits » concernant les moines est évidemment lié à la perception que l'on avait de la vie religieuse comme état de perfection. Ce qui est important ici, c'est de percevoir à quel point Dom Guéranger insiste sur la qualité de chrétiens tant pour les moines que pour les oblats. S'ils sont d'abord des chrétiens, les oblats se reconnaîtront en tout premier lieu comme membres de l'Eglise, vivant dans une attention particulière à l'esprit dans lequel elle vit : « Ainsi les oblats sont avant tout de vrais chrétiens ; leur vie est simplement la vie de la foi, leur esprit propre est uniquement l'esprit chrétien dans sa plénitude, autrement dit l'esprit de l'Eglise. » Dans le même sens, à la question « Quels sont ceux qui pourront être reçus ? », Dom Guéranger répond : « Tous ceux qui voudront vivre chrétiennement suivant ces règles. » et au chapitre « De l'habit des oblats » : « Ils porteront sous leurs habits un scapulaire noir et une petite ceinture de cuir, et ils ne se distingueront en rien à l'extérieur que par la simplicité et la modestie de leurs vêtements et de leur maintien. » Les termes de cette dernière description font incontestablement penser à la description de la vie des chrétiens dans l'Epitre à Diognète.
IV. Dom Guéranger et l'Eglise
Le statut des Oblats de S. Benoît
Il faut nous arrêter ici sur cette conception primordiale de Dom Guéranger. Toute sa pensée et toute son action trouvent leur origine dans une vision universelle de l'Eglise. Ce point a été remarquablement mis en valeur lors du dernier Colloque sur Dom Guéranger, à l'Abbaye Saint-Pierre de Solesmes du 4 au 8 avril 2005, à l'occasion du deuxième centenaire de sa naissance. Pour Dom Guéranger, l'Eglise est l'Epouse du Verbe incarnée, le Corps Mystique du Christ, autant de notions qui sont encore peu employées à cette époque et par rapport auxquelles le Concile de Vatican I tentera d'amorcer une réflexion. Ces thèmes doivent sûrement au renouveau de l'ecclésiologie allemande avec Moehler et aux propositions de La Mennais et de ses amis. L'Eglise est donc le prolongement historique de l'Incarnation du Verbe. S'il y a insistance chez Dom Guéranger sur la liturgie, c'est parce que les rites sont les signes visibles du Christ dans son Corps qui est l'Eglise. La liturgie est « le langage de l'Epouse du Christ. » Par ailleurs, Dom Guéranger se montre sensible à la grande Tradition patristique qui inscrit la vie de l'Eglise dans un enracinement auquel sa vocation l'incline à être attentif. La liturgie romaine soutient cet intérêt patristique plus alors que les missels des diocèses français dont il finit par dénoncer la modernité et la banalité de ton. Ainsi tant par la tradition que par la liturgie, Dom Guéranger souhaite élargir constamment sa pensée aux dimensions de l'Eglise aussi bien dans son profond enracinement historique que dans son universalité, sa catholicité. C'est pourquoi il se fera aussi l'ardent défenseur du ministère du Pape. Lorsque Dom Guéranger envisage sérieusement de restaurer le Prieuré de Solesmes, son propos est tout entier « au service de l'Eglise ». Il a le désir de fonder là une véritable université ou académie, de publier "un journal de la science ecclésiastique", de créer une imprimerie pour reproduire les éditions mauristes des Pères. Dom Guéranger souhaite donc servir l'Eglise en créant un lieu d'études saintes et de prières, notamment liturgiques dans l'esprit de la Règle bénédictine. Pour lui le monachisme comme on l'a déjà dit est une forme de vie chrétienne. Il n'y a pas du tout chez Dom Guéranger l'idée de reconstituer un monachisme d'une autre époque ; il est extrêmement sensible à un monachisme contemporain, inséré dans l'Eglise de son temps, pour être « prêt à rendre des services en tout genre dans la sainte liberté de l'Esprit de Dieu. Il est bien évident cependant que les services rendus viennent en second après l'engagement à la prière et à la vie fraternelle, c'est-à-dire au témoignage à l'intérieur du monastère. La vie monastique est comme le coeur du grand corps ecclésial. Pour Dom Guéranger, la vie de ce corps s'exprime et se déploie par la liturgie et l'étude comme activités principales. Mais ces deux domaines sont approfondis en rapport avec la vision de l'Eglise : un enracinement dans sa tradition antique afin d'être le plus universel possible et une liturgie demandée par Rome pour donner à l'Eglise de ce temps, une image la plus large possible.


V. L'Eglise et la société de la louange divine
Ce texte a aussi été rédigé quelque temps avant la mort de Dom Guéranger. Il n'était pas dans son esprit un règlement pour les oblats, mais un opuscule général pour tous ceux qui voulaient s'associer à la prière des moines. Cet ouvrage nous intéresse pour la théologie qui le soutient et qui confirme les réflexions précédentes. Le titre lui-même place en tête le souci de l'Eglise et non celui de la vie monastique prise pour elle-même. Le principe de l'Incarnation et de son prolongement dans l'Eglise est réaffirmé dès la première page. La communion ecclésiale est le meilleur moyen de rejoindre le Christ, époux de l'Eglise. C'est pourquoi Dom Guéranger prêche « la plus profonde soumission d'esprit et de coeur à cette Eglise sainte. » Et tout aussitôt, il met l'accent sur l'attention à la liturgie : les sept sacrements, le saint Sacrifice de la Messe « qui
est le même que celui de la Croix, la sainte communion que l'on ne doit pas isoler du saint Sacrifice et que l'on doit être empressé à fréquenter. Il recommande aussi une piété tendre et profonde envers la très sainte et immaculée Mère de Dieu. L'attention de Dom Guéranger à la Mère de Dieu et tout spécialement à son Immaculée Conception est à situer en étroite relation avec le mystère de l'Incarnation. Il préconise aussi une dévotion fervente envers les Anges, les Saints et la vénération des saintes Reliques et des saintes Icônes, ainsi que l'estime des pèlerinages. Enfin, pour s'unir à l'esprit de la sainte Eglise, les fidèles seront attentifs à honorer le pontife romain. Ils auront du respect et un esprit de soumission pour leur évêque. Et ils seront soucieux de contribuer à donner à l'Eglise des ministres capables d'instruire sur la doctrine, zélés pour le règne de Jésus-Christ et pour la sanctification des âmes. Après quoi, Dom Guéranger voulait re-situer à l'intérieur de cette démarche, l'état religieux, mais il n'eut pas le temps de le faire. Il revient donc sur la vocation chrétienne en général. Il demande que l'on ait une estime particulière pour le beau nom de chrétien et pour le « surnom » de catholique. Il appelle à préférer toujours, en fait de dévotions et d'objets du culte, ce qui porte l'empreinte du pouvoir céleste qu'exerce la sainte Eglise, avec une attention particulière au Calendrier liturgique. C'est pourquoi, Dom Guéranger propose une association de fidèles « afin d'aider à la conservation et à l'accroissement de cet esprit ecclésial. Cette association invite aux pratiques suivantes :
o La participation à la messe solennelle (avec communion si possible) pour les dimanches et fêtes en s'efforçant de pénétrer et goûter le sens, à en connaître l'antiquité et l'institution
o L'attention aux chants avec l'aide de traductions sans faire autre chose pendant la liturgie que de mettre tout son soin à la suivre en s'y unissant profondément par l'intelligence et le sens spirituel.
o La fréquentation des offices divins, spécialement les dimanches et jours de fête sous la forme des Heures canoniales telles qu'elles peuvent être célébrées selon la règle canonique en certaines églises comme la Cathédrale. Les associés alimenteront leur prière personnelle en se servant des prières de l'Eglise comme expression de leurs sentiments.
o La pratique de l'oraison mentale en vue de l'union à Dieu.
Dom Guéranger termine son opuscule en évoquant les différents temps liturgiques et leur apport spécifique. Ce texte est tout à fait instructif sur l'esprit que dom Guéranger souhaite voir régner chez les fidèles qui veulent s'unir à son projet d'association. Ce qui compte avant tout, c'est le témoignage de l'Eglise comme Corps du Christ prolongeant en ce monde le mystère de son Incarnation.
VI. Les oblats et la vie monastique aujourd'hui
La théologie de Dom Guéranger reste plus que jamais d'actualité. Le mystère de l'Eglise est au centre des préoccupations chrétiennes actuelles. La constitution Lumen Gentium consacre un chapitre entier à la sainteté pour tous. Le laïcat retrouve toute sa place dans la vie de l'Eglise et l'engagement spirituel reste un élément tout à fait capital dans la vie de tout chrétien. On peut même dire qu'aujourd'hui, nous sommes attendus sur le terrain d'une pastorale spirituelle pour laquelle les oblats de nos monastères peuvent être très moteurs. Pour faire droit aux différents niveaux d'association avec le monastère, je voudrais souligner l'importance du congrès des oblats bénédictins proposé par le P. Abbé Primat qui eut lieu en septembre 2005. C'est la première fois que des oblats bénédictins se sont ainsi retrouvés autour du Primat à Rome. Le caractère universel de cette expérience va bien dans le sens de Dom Guéranger même si ce dernier ne préconisait guère les réunions d'oblats. Si l'oblature est importante aujourd'hui, c'est qu'elle permet à certaines sensibilités d'être ainsi affermies dans la foi pour annoncer l'Evangile de Dieu en Eglise. Nous attendons de ce Congrès qu'il ouvre des perspectives sur l'oblature en relation avec la doctrine de Vatican II. Solitude et communion. L'oblat aujourd'hui est marqué par le fait que son association à une communauté monastique est une démarche individuelle mais aussi un témoignage communautaire. On sait que l'équilibre est difficile à tenir mais il est capital, car il y a là l'un des problèmes majeures de nos sociétés occidentales : la dimension individuelle de tout engagement est mise en avant et par ailleurs, la recherche de la communauté est constante sans pour autant toujours aboutir. Cette tension peut s'exprimer en termes monastiques : solitude et communion. Les oblats, dans la souplesse mais aussi l'exigence de leur engagement peuvent heureusement en témoigner.
Communautés d'Eglise.
L'une des questions majeures de la vie des Eglises aujourd'hui est celle du témoignage et de la pertinence des communautés chrétiennes. Les paroisses ne suffisent plus à ce témoignage. Il est nécessaire que la vie des communautés locales soit complétée par des ensembles plus larges. Il me semble qu'il y aura là un point à creuser. La communauté monastique pourrait faire partie d'un regroupement de chrétiens sur un territoire donné avec un témoignage commun où prêtres, diacres, laïcs, religieux, religieuses et moines joueraient leurs rôles respectifs mais avec un souci commun de témoignage évangéliques qui passerait aussi par des temps de prière communs ainsi que des temps d'approfondissement de la foi et de partage fraternels.


Les statuts des oblats bénédictins:


Ces statuts ont pour objectif de :

Il est entendu que ces statuts sont vécus par les oblats selon la tradition propre à chaque monastère.

CHAPITRE 1 - L'oblat, l'oblature, l'oblation

1) L'oblat :

Appelé par Dieu à vivre l'Évangile selon l'esprit de saint Benoît, tel qu'il s'incarne dans sa règle, tout chrétien peut se lier par l'oblature à un monastère bénédictin.

2) Par oblature, on entend :

-D'une façon générale, l'institution des oblats bénédictins,
-D'une façon plus précise, l'oblature de tel monastère,

C'est-à-dire l'ensemble des oblats de ce monastère.

3) L'oblation :

C'est l'acte par lequel un chrétien s'offre à Dieu et devient membre d'une communauté monastique d'une façon réelle, mais pas au même titre que les moines.
Cette offrande n'est pas un vœu, mais signifie la volonté
D'approfondir son sens et son amour de Dieu par une conversion poursuivie la vie durant.

4) Admission à l'oblature :

Tous les monastères de moines et de moniales sont habilités à recevoir des oblats et des oblates laïques ainsi que des prêtres.
Peut devenir oblat d'un monastère tout fidèle dont la maturité spirituelle, au jugement de l'abbé et de son délégué, lui permet de peser la gravité de cette démarche.
On ne peut appartenir simultanément à deux associations de fidèles.

5) Les étapes de l'oblature :

La demande d'un chrétien à devenir oblat suppose des liens spirituels sérieux existants déjà avec le monastère auquel il désire appartenir.
Une période de formation précède l'oblation.
Le début en est marqué par un rite d'admission.
Durant ce temps de formation, le futur oblat doit approfondir sa vie chrétienne. Pour cela il s'imprègne de l'esprit de la Règle de saint Benoît par les moyens jugés les meilleurs par la personne responsable des oblats et lui-même (lecture, étude, parrainage, réunion, etc.).
Ce temps de formation dure en principe une année. Il pourra être abrégé ou prolongé au jugement de l'abbé ou de son délégué, afin que l'oblation s'accomplisse dans les meilleures conditions.

6) Liturgie d'oblation :

La probation achevée, le futur oblat écrira sa charte et fera son oblation selon la formule du rituel du monastère. Elle sera reçue par l'abbé ou son délégué.
Elle s'accomplit normalement en présence de la famille monastique représentée au moins par quelques moines et oblats.
Les chartes d'oblation sont conservées au monastère. Les noms des oblats sont inscrits sur un registre. Un document est remis à chacun témoignant de son engagement.

7) L'oblation fait de l'oblat un membre de la famille monastique :

Les moines deviennent ses frères et lui se considère comme témoin de la vie monastique dans le monde. L'abbé du monastère devient son père et l'oblat a envers lui une confiance filiale.
Ce lien aide l'oblat à prendre davantage conscience de ses responsabilités humaines (familiales, professionnelles, sociales, etc.) et chrétiennes (ecclésiales et paroissiales) et n'entraîne pas de la part de l'abbé une juridiction.

CHAPITRE 1.1
L'oblat et le monastère

8) Liens réciproques :
Le monastère, toujours fidèle à sa vocation propre qui est d'affirmer le primat de Dieu, de manifester le Christ et la puissance de son esprit et de rappeler le caractère eschatologique de la vocation chrétienne, assure à chaque oblat :
- la participation à la vie de prière et d'offrande des moines,
- une formation doctrinale et spirituelle surtout durant le temps de probation,
- une direction spirituelle dans la mesure où il le désire,
- la possibilité de contacts avec le monastère : séjours, retraites et récollections, bulletin ou lettre périodique, etc...
Le monastère prend conscience de l'élargissement de la famille monastique par l'oblature dont la Communauté tout entière se sent responsable. L'abbé délègue un moine au service des oblats. Informés de la vie de l'oblature, les moines sont ouverts aux valeurs que peuvent apporter les oblats.

9) L'oblat se sent étroitement solidaire de sa famille monastique

Cette solidarité se traduit :
- d'abord par la prière pour les moines et par une attitude d'offrande sans cesse renouvelée de sa vie à Dieu en union avec la consécration des moines ;
- par l'intérêt porté à la vie du monastère, à ses joies et à ses peines, à sa place et à ses travaux dans l'Église d'aujourd'hui. Cet intérêt s'étend à l'Ordre Monastique tout entier ;
- par une aide effective selon les circonstances, les possibilités et les compétences de chacun.

10) Fraternité entre oblats d'un même monastère :

L'oblature établit entre les oblats des liens de fraternité. Les relations de filiation avec un même monastère font naître entre ses membres des affinités. Celles-ci peuvent s'exprimer dans des réunions communes, où les oblats prient et progressent ensemble dans l'esprit de leur oblature.

11) Fraternité entre oblats de divers monastères :

La répartition géographique des oblats de divers monastères est si variée qu'elle peut donner l'occasion aux oblats d'une même ville ou d'une même région de se connaître et d'avoir des réunions et récollections animées par un père de l'un ou l'autre monastère.

12) Les foyers oblats :

D'un même monastère ou de divers monastères gagneront beaucoup à mettre en commun leur expérience pour faire fructifier en eux, dans l'esprit de leur oblature, la grâce du sacrement de mariage.

13) Les prêtres oblats :

De par leur formation et leur activité sacerdotale, auront peut-être avantage à se retrouver ensemble avec un Père selon leur désir et possibilité.

CHAPITRE 1.1.1

La vie en oblature


14) Comme à tout baptisé :


Membre du peuple de Dieu, s'adresse à l'oblat l'appel universel à la sainteté. C'est en communion avec sa famille monastique et en entrant dans l'esprit de la Règle de saint Benoît qu'il vivra l'unique Évangile et réalisera le dessein de Dieu sur lui.
L'oblat, fils de saint Benoît, a entendu l'appel à la « conversion du cœur ». Toute sa vie doit être une tension vers Dieu, « une recherche de Dieu ». Elle acquiert ainsi un caractère filial, un caractère pascal et elle témoigne de la présence du Royaume dès ici-bas.

15) L'oblat « ne préfère rien à l'amour du Christ » :

A l'imitation du Christ tourné vers le Père, il veut que sa vie entière se déroule en présence de Dieu, créateur qu'il révère, Maître aimé dont il écoute la voix, pour s'imprégner de ses enseignements et lui obéir avec joie, à qui il veut rendre gloire, même dans les affaires les plus matérielles, Père avec qui il veut habiter et sur qui il compte en toutes circonstances. Animé de l'esprit de foi, l'oblat trouve le Christ en tout homme. En ses actes, l'oblat s'efforce de chercher Dieu.

16) Sa vie filiale et fraternelle :

Se trouve réalisée à la perfection dans la participation au Mystère eucharistique, vrai centre de toute la vie chrétienne, « source par excellence de la sanctification des hommes dans le Christ et de la glorification de Dieu ».

CARACTÈRE FILIAL : ESPRIT DE PRIÈRE

17) L'oblat désire mettre en pratique :
Autant qu'il lui est possible, le précepte du Seigneur : « Priez sans cesse », cherchant à faire de toute sa vie une prière. Il sait cependant que pour tendre à la prière continuelle, il est indispensable de consacrer des instants privilégiés à la prière : prière personnelle et silencieuse, qui trouve dans la prière liturgique célébrée en union avec son monastère et avec toute l'Église, à la fois l'expression la plus parfaite, le stimulant et l'aliment le plus substantiel.


18) La mesure et la forme :

De cette participation à l'office divin ne sauraient être codifiées uniformément pour tous. Suivant ses conditions de vie et son attrait personnel, chacun pourra choisir avec le conseil de son père spirituel :
- une partie de l'Office, tel qu'il est célébré au monastère,
- une partie de l'Office selon une répartition différente et
- un Office abrégé.
- le psautier utilisé plus librement.
L'oblat sait que sa participation à la liturgie a toujours pour but de promouvoir, d'entretenir et d'approfondir sa prière continuelle.

19) Cette vie de prière :

Requiert l'écoute assidue de la Parole de Dieu.
Aussi l'oblat s'applique-t-il à la « Lectio divina »
dont l'importance est soulignée par toute la tradition monastique.
Cette lecture porte sur la Sainte Écriture, inséparable de l'interprétation qu'en a donné la Tradition : les Pères, les documents pontificaux et conciliaires et les meilleurs auteurs spirituels, anciens et modernes. La Règle de saint Benoît et ses commentaires ont une place privilégiée parmi les lectures de l'oblat.

20) Cette vie de prière :

Est favorisée par un indispensable climat de silence, qui est à la fois communication avec Dieu et avec le prochain et dépend moins des conditions extérieures que d'une aptitude à écouter Dieu.

VIE PASCALE - JOYEUSE PÉNITENCE

21) Toute vie chrétienne est une vie pascale :

Le baptême nous ensevelit dans la mort du Christ pour ressusciter avec Lui et vivre à Dieu (Romains 6,1-11).
C'est en étant par la foi étroitement associée au Christ dans son Mystère pascal, que l'oblat réalise la conversion de son cœur.

22) Cette vie pascale est décrite par la règle :

Comme « une ascèse spirituelle ». Dans la réalisation quotidienne, elle apparaît à l'oblat comme un combat contre les forces du mal agissantes en lui-même et dans le monde. Elle se manifeste dans la recherche constante de la volonté de Dieu en esprit d'obéissance ; elle engendre un véritable esprit de pauvreté qui n'est pas mépris mais liberté spirituelle à l'égard des biens extérieurs et intérieurs.

23) Pour l'oblat :

Cette ascèse s'identifie avec l'esprit de pénitence pour la réparation de ses péchés et de ceux du monde entier.
Cette pénitence, dont il ne néglige pas les actes extérieurs, prend toute sa valeur personnelle et ecclésiale dans la participation au sacrement de Pénitence.

24) L'ascèse bénédictine :

Se caractérise aussi par la « discrétion » (c'est-à-dire le discernement). Inspirée par l'amour, elle ne vise qu'à l'accroissement de l'amour. Elle s'exerce toujours dans un climat de joie et de paix, « le cœur dilaté » et ne pèse jamais sur l'entourage de l'oblat.

25) Cette ascèse :
Telle que saint Benoît la propose à ses fils, se trouve parfaitement résumée dans les douze degrés d'humilité. Enracinée dans la foi en la transcendance de Dieu Amour, elle entretient le souvenir de sa présence, entraîne une attitude d'obéissance aimante à sa volonté, de patience et de magnanimité dans l'adversité, engendre l'esprit de pauvreté et s'épanouit dans la « charité parfaite ». Par surcroît elle procure l'épanouissement de cette sagesse que saint Benoît associe volontiers à l'humilité. »

PRÉSENCE DU ROYAUME DÈS ICI-BAS

26) C'est dans le monde :

Et par toute activité humaine que l'oblat poursuit sa recherche de Dieu et peut être à la fois signe du Royaume et ferment de vie divine.
À la lumière de l'Évangile et de la Règle, le fils de saint Benoît allie une profonde estime de toutes les valeurs d'ici-bas et le discernement qui lui permet d'ordonner leur usage à l'avènement du Royaume.

27) Si l'oblat :

Se trouve appelé à renoncer à certains biens positifs, à certaines valeurs réelles, en aucun cas il ne saurait y avoir mépris du monde ou attitude purement négative, mais dépassement en vue du Royaume.

28) Selon son état, l'oblat :

Considère l'esprit de pauvreté et de charité comme des signes et une anticipation de la vie future.

29) Cette recherche de Dieu:

Dans toute vie se traduit positivement par une vie fraternelle, aux actes et aux attitudes bien définis par la Règle : le respect, l'obéissance mutuelle et surtout le service ; le tout étant soumis à un ordre générateur d'harmonie et de paix. Réaliste, elle s'ouvre à tous les hommes et les porte dans sa prière. Elle est miséricorde pour les faiblesses et soutien dans les difficultés. Conformément à la tradition monastique, l'oblat pratique l'accueil, surtout envers les déshérités, les étrangers, luttant contre tous les préjugés et cloisonnements de race, de classe et d'éducation.

30) « Nous espérons n'avoir rien établi de pénible ni d'accablant :

Mais si quelque chose te paraît un peu sévère, garde-toi bien de fuir. Dans la mesure où l'on progresse dans la vertu et dans la foi, le cœur se dilate et, avec une inexprimable douceur d'amour, on se met à courir dans la voie des volontés divines...Ainsi participant à la Croix du Christ, on a part à la gloire de son Royaume ». (Prologue de la Règle)

Fort de cette confiance en la grâce du Christ Ressuscité, l'oblat prolonge dans le monde la vie de son monastère, glorifie Dieu avec toute l'Église. Il devient pour son prochain, par son optimisme fort, porteur de la joie et de la paix du Christ.

31) Avec son charisme particulier :

L'oblature se propose de rendre ses membres « parfaits dans le Christ » (Colossiens 1,28).
Elle se situe au cœur même de la vie de l'Église et participe à sa contemplation et à sa mission. Elle rappelle la primauté des valeurs chrétiennes dont les monastères portent le témoignage spécial dans l'Église.


Chaque oblat est particulièrement réceptif aux appels de l'Esprit, aux orientations et consignes données par la hiérarchie, et, disponible pour toutes les tâches qui s'offrent au chrétien « à la mesure du don du Christ » (Ephésiens 4,7) dans le monde d'aujourd'hui.

Même dans la vie la plus silencieuse et la plus obscure, comme celle de sa famille monastique, il peut coopérer pleinement à la mission salutaire de l'Église comme témoin et instrument vivant.

[Haut]

Rituel de l'oblation
Le verset 116 du psaume 118 est utilisé pour s'offrir au Seigneur

Reçois-moi, Seigneur, selon ta parole et je vivrai.

Que je ne sois pas confondu dans mon attente.

Reçois-moi, Seigneur, tel que je suis,

Tel que tu m'as voulu dans tes desseins éternels, avant que je sois formé dans le sein de ma mère. Si tu ne me reçois pas comme je suis, impossible pour moi d'aller jusqu'à toi. Tu parais loin, Seigneur. Me recevoir veut dire "Viens à moi, car je ne puis aller à toi de mes propres forces". Oui, montre toi de plus en plus proche. Reçois-moi parce que je frappe à la porte. Entends ma voix. Ouvre-moi ta porte pour que j'entre chez toi. Prends ton repas avec moi et moi avec toi.

Reçois-moi avec mes faiblesses, mon passé.

Reçois-moi aujourd'hui avec le don que je fais de moi-même. Reçois-moi demain et après-demain ; reçois-moi quand je t'oublierai, car toi tu ne m'oublies pas. Reçois-moi au moment de quitter ce monde ; reçois-moi aux noces de l'Agneau avec Abraham et tous les saints pour partager la coupe du vin nouveau.

Reçois-moi selon ta parole.

Tu me reçois parce que tu t'es lié à moi, selon ta Parole, ton Verbe qui a pris une nature humaine semblable à la mienne. Tu me reçois pour me conformer à ce Verbe. Plus je dévore ta Parole plus elle fait ma joie et les délices de mon cœur. Parole transformante, exigeante, en laquelle je trouve mon plaisir. N'ôte pas de ma bouche ta parole de vérité. Rappelle-toi ta Parole en me recevant dans tes demeures éternelles où ton Verbe dialogue avec toi dans l'amour de l'Esprit.

Si tu me reçois, je vivrai.

Tu me reçois pour que je vive non pas hors de toi mais de toi et en toi. Car à quoi me servirait d'être reçu pour être déçu ? Reçois-moi pour que je vive en ta présence, pour que je m'efface devant tes grandeurs et pour mieux les contempler. Tu me reçois dès ici-bas pour que je vive de la table de ta Parole et de ton Corps. Enivre-moi de ton Sang, pour que ton Esprit m'inspire comment mieux vivre.

Ne me confonds pas dans mon attente.

Aurai-je encore des attentes après que tu m'auras reçu ? Même si tu me reçois, même si tu me caches dans le creux de ta main, purifie mes attentes. Car je puis me tromper ; attendre ce que tu donnes, et non qui tu es. Dans cette attente, que je reste vigilant comme un serviteur qui guette le retour de son maître. Car ils sont aussi tes serviteurs ceux qui restent vigilants pour t'attendre. Si je m'endors, au moment où j'entendrai le cri : "Voici l'époux" que ma lampe reste allumée, car ta Parole est une lampe, sur mes pas. Service attentif, paisible, joyeux, patient. Attente qui attend, mais attente qui enfin reçoit. Je t'attends pour te recevoir ; je te reçois pour être capable de continuer à t'attendre.

Reçois-moi dans mon attente.

Attends-moi pour que je ne sois pas confondu.

Amen


Dom Guéranger et l'oblature bénédictine aujourd'hui


Texte extrait du site de l'abbaye de Ligugé 


Dom Guéranger est à l'origine du rétablissement de l'oblature dans l'Ordre de saint Benoît après plusieurs siècles d'interruption. Cette oeuvre a accompagné celle de la restauration de la vie bénédictine au 19ème siècle. Dom Guéranger était très convaincu de son utilité et a pris le temps de réfléchir à ce projet avec une grande prudence face aux évènements que la Providence a suscité en ce sens.
Il est important, dans un premier temps de revenir sur les sources de cette institution séculaire de l'oblature. Elles posent les bases d'une association entre les fidèles laïcs et les moines regroupés en communauté. Cette question reste d'actualité. Il sera utile de tirer les leçons de l'histoire et de l'intuition de Dom Guéranger, pour imaginer une progression dans l'association des laïcs à la vie monastique aujourd'hui.
I. La Règle de Saint Benoît
Le chapitre 59 de la Règle de saint Benoît (en abrégé RB dans ce texte) règlemente l'oblature des enfants qui sont présentés au monastère par leurs parents. Il y est décrit le rite de la déposition de la pétition rédigée par les parents avec l'offrande (celle du pain et du vin pour l'eucharistie) enveloppées avec la main de l'enfant dans la nappe, sur l'autel. Les enfants concernés ne portent pas directement le titre d'oblats et ce terme n'est en fait mentionné nulle part dans la Règle. C'est un véritable engagement monastique qui vise à assurer la stabilité de ceux qui se lient ainsi à la vie du monastère et qui ne peuvent revenir sur cet engagement à l'âge adulte. Sur ce point, la RB est plus sévère que d'autres règles antérieures ou contemporaines.
II. Jalons historiques
Notre propos concernant l'oblature séculière des adultes ne trouve donc pas son origine dans ce chapitre de la RB. C'est au XIème siècle que l'on voit apparaître dans les Congrégations d'Hirshau en Allemagne et de Cluny en France, des oblats adultes. Selon les propos de dom MP. Deroux, abbé de Ligugé en 1927, il semble que « la cause principale de l'introduction des frères convers et des oblats dans les monastères doive être cherchée dans la désaffection des moines pour le travail manuel ». L'investissement liturgique, notamment dans la Congrégation de Cluny, ne permettait plus le même rendement des moines dans les activités de travail manuel. L'introduction de famuli pour aider les moines dans leurs activités ordinaires est très probablement à l'origine du recrutement des oblats, sans être la seule. Les noms donnés à ces laïcs se joignant à la communauté monastique sont très variés : oblati, familiarii, fratres conscripti, laici conversi, prebendarii, donati, etc. et dénote des origines diverses. A Hirshau, au XIème siècle et dans la suite, « tous les laïcs vivent dans la clôture ou dans ses alentours. Ils sont vis-à-vis du monastère, dans une certaine dépendance et un lien religieux à peu près semblable les rattache sans qu'aucun d'eux ait un statut précis. » L'Abbé Guillaume d'Hirshau est à l'origine d'une première élaboration d'un statut pour tous ces laïcs joints au monastère. La relation de l'oblat au monastère reste souple : il fait don d'une partie ou de tout ses biens à la communauté ; il fait don de sa personne par une promesse d'obéissance à l'Abbé. Il est considéré comme faisant partie de la famille monastique. Mais l'Abbé peut le relever de sa promesse d'obéissance. Souvent le monastère confie des charges matérielles ou administratives à ces laïcs qui sont souvent des notables. Cette institution perdurera jusqu'au XVIème siècle. Elle perd progressivement toute vitalité avant de renaître sous une nouvelle forme au XIXème siècle.
III. L'oblature dans la Congrégation de France
L'histoire de la restauration de l'ancienne institution des oblats dans l'Ordre bénédictin au XIXème siècle est complexe. Nous ne voulons en donner ici le détail, mais simplement insister sur quelques dimensions de cette restauration pour alimenter notre réflexion présente. Un premier état du lien entre des laïcs et les monastères de la Congrégation de France se fit sous le mode de l'affiliation telle qu'elle se pratiquait dans d'autres ordres comme celui des Trappistes. Cette pratique était essentiellement spirituelle : elle assurait les personnes qui en bénéficiaient des prières du monastère à leur intention souvent comme un signe de reconnaissance.
Les premiers oblats, au sens où nous l'entendons aujourd'hui, firent leur apparition en 1868. Ils sont appelés à s'inspirer de la Règle de saint Benoît, mais aussi des écrits de sainte Gertrude, et à suivre le calendrier bénédictin, spécialement pour les jours de solennités. Pourtant Dom Guéranger avait en tête un projet plus développé qu'il ne put jamais proposer dans toute son ampleur. L'expérience d'un lien privilégié entre le monastère de Sainte-Madeleine de Marseille et des prêtres du diocèse qui souhaitaient se structurer en confrérie invite Dom Guéranger à préciser que pour lui, l'oblature n'est en rien semblable à un tiers-ordre. Sur l'insistance maintes fois répétée de dom Le Menant des Chesnais, Prieur de Sainte-Madeleine, quelques temps avant sa mort, Dom Guéranger dicte une petite Règle pour les oblats en 1874. Ce texte vient d'être publié dans le Bulletin des Amis et Oblats de l'Abbaye Sainte-Marie de Paris. Dom Guéranger ne voit dans cette Règle qu'une ébauche d'un écrit plus important. Il disait lui-même à ce sujet : « Je veux quelque chose de grand, de solide, de beau, qui procure la gloire de Dieu » (lettre à Dom Gauthey, en 1974). Ce qui est le plus caractéristique dans cet écrit comme en bien d'autres de Dom Guéranger, c'est la largeur de vue du propos. Il ne s'agit pas de copier la vie monastique, mais d'être authentiquement chrétien « en s'appuyant sur les moines qui ne sont en réalité que des chrétiens parfaits attachés uniquement au Christ ». Le terme de « parfaits » concernant les moines est évidemment lié à la perception que l'on avait de la vie religieuse comme état de perfection. Ce qui est important ici, c'est de percevoir à quel point Dom Guéranger insiste sur la qualité de chrétiens tant pour les moines que pour les oblats. S'ils sont d'abord des chrétiens, les oblats se reconnaîtront en tout premier lieu comme membres de l'Eglise, vivant dans une attention particulière à l'esprit dans lequel elle vit : « Ainsi les oblats sont avant tout de vrais chrétiens ; leur vie est simplement la vie de la foi, leur esprit propre est uniquement l'esprit chrétien dans sa plénitude, autrement dit l'esprit de l'Eglise. » Dans le même sens, à la question « Quels sont ceux qui pourront être reçus ? », Dom Guéranger répond : « Tous ceux qui voudront vivre chrétiennement suivant ces règles. » et au chapitre « De l'habit des oblats » : « Ils porteront sous leurs habits un scapulaire noir et une petite ceinture de cuir, et ils ne se distingueront en rien à l'extérieur que par la simplicité et la modestie de leurs vêtements et de leur maintien. » Les termes de cette dernière description font incontestablement penser à la description de la vie des chrétiens dans l'Epitre à Diognète.
IV. Dom Guéranger et l'Eglise
Le statut des Oblats de S. Benoît
Il faut nous arrêter ici sur cette conception primordiale de Dom Guéranger. Toute sa pensée et toute son action trouvent leur origine dans une vision universelle de l'Eglise. Ce point a été remarquablement mis en valeur lors du dernier Colloque sur Dom Guéranger, à l'Abbaye Saint-Pierre de Solesmes du 4 au 8 avril 2005, à l'occasion du deuxième centenaire de sa naissance. Pour Dom Guéranger, l'Eglise est l'Epouse du Verbe incarnée, le Corps Mystique du Christ, autant de notions qui sont encore peu employées à cette époque et par rapport auxquelles le Concile de Vatican I tentera d'amorcer une réflexion. Ces thèmes doivent sûrement au renouveau de l'ecclésiologie allemande avec Moehler et aux propositions de La Mennais et de ses amis. L'Eglise est donc le prolongement historique de l'Incarnation du Verbe. S'il y a insistance chez Dom Guéranger sur la liturgie, c'est parce que les rites sont les signes visibles du Christ dans son Corps qui est l'Eglise. La liturgie est « le langage de l'Epouse du Christ. » Par ailleurs, Dom Guéranger se montre sensible à la grande Tradition patristique qui inscrit la vie de l'Eglise dans un enracinement auquel sa vocation l'incline à être attentif. La liturgie romaine soutient cet intérêt patristique plus alors que les missels des diocèses français dont il finit par dénoncer la modernité et la banalité de ton. Ainsi tant par la tradition que par la liturgie, Dom Guéranger souhaite élargir constamment sa pensée aux dimensions de l'Eglise aussi bien dans son profond enracinement historique que dans son universalité, sa catholicité. C'est pourquoi il se fera aussi l'ardent défenseur du ministère du Pape. Lorsque Dom Guéranger envisage sérieusement de restaurer le Prieuré de Solesmes, son propos est tout entier « au service de l'Eglise ». Il a le désir de fonder là une véritable université ou académie, de publier "un journal de la science ecclésiastique", de créer une imprimerie pour reproduire les éditions mauristes des Pères. Dom Guéranger souhaite donc servir l'Eglise en créant un lieu d'études saintes et de prières, notamment liturgiques dans l'esprit de la Règle bénédictine. Pour lui le monachisme comme on l'a déjà dit est une forme de vie chrétienne. Il n'y a pas du tout chez Dom Guéranger l'idée de reconstituer un monachisme d'une autre époque ; il est extrêmement sensible à un monachisme contemporain, inséré dans l'Eglise de son temps, pour être « prêt à rendre des services en tout genre dans la sainte liberté de l'Esprit de Dieu. Il est bien évident cependant que les services rendus viennent en second après l'engagement à la prière et à la vie fraternelle, c'est-à-dire au témoignage à l'intérieur du monastère. La vie monastique est comme le coeur du grand corps ecclésial. Pour Dom Guéranger, la vie de ce corps s'exprime et se déploie par la liturgie et l'étude comme activités principales. Mais ces deux domaines sont approfondis en rapport avec la vision de l'Eglise : un enracinement dans sa tradition antique afin d'être le plus universel possible et une liturgie demandée par Rome pour donner à l'Eglise de ce temps, une image la plus large possible.
V. L'Eglise et la société de la louange divine
Ce texte a aussi été rédigé quelque temps avant la mort de Dom Guéranger. Il n'était pas dans son esprit un règlement pour les oblats, mais un opuscule général pour tous ceux qui voulaient s'associer à la prière des moines. Cet ouvrage nous intéresse pour la théologie qui le soutient et qui confirme les réflexions précédentes. Le titre lui-même place en tête le souci de l'Eglise et non celui de la vie monastique prise pour elle-même. Le principe de l'Incarnation et de son prolongement dans l'Eglise est réaffirmé dès la première page. La communion ecclésiale est le meilleur moyen de rejoindre le Christ, époux de l'Eglise. C'est pourquoi Dom Guéranger prêche « la plus profonde soumission d'esprit et de coeur à cette Eglise sainte. » Et tout aussitôt, il met l'accent sur l'attention à la liturgie : les sept sacrements, le saint Sacrifice de la Messe « qui
est le même que celui de la Croix, la sainte communion que l'on ne doit pas isoler du saint Sacrifice et que l'on doit être empressé à fréquenter. Il recommande aussi une piété tendre et profonde envers la très sainte et immaculée Mère de Dieu. L'attention de Dom Guéranger à la Mère de Dieu et tout spécialement à son Immaculée Conception est à situer en étroite relation avec le mystère de l'Incarnation. Il préconise aussi une dévotion fervente envers les Anges, les Saints et la vénération des saintes Reliques et des saintes Icônes, ainsi que l'estime des pèlerinages. Enfin, pour s'unir à l'esprit de la sainte Eglise, les fidèles seront attentifs à honorer le pontife romain. Ils auront du respect et un esprit de soumission pour leur évêque. Et ils seront soucieux de contribuer à donner à l'Eglise des ministres capables d'instruire sur la doctrine, zélés pour le règne de Jésus-Christ et pour la sanctification des âmes. Après quoi, Dom Guéranger voulait re-situer à l'intérieur de cette démarche, l'état religieux, mais il n'eut pas le temps de le faire. Il revient donc sur la vocation chrétienne en général. Il demande que l'on ait une estime particulière pour le beau nom de chrétien et pour le « surnom » de catholique. Il appelle à préférer toujours, en fait de dévotions et d'objets du culte, ce qui porte l'empreinte du pouvoir céleste qu'exerce la sainte Eglise, avec une attention particulière au Calendrier liturgique. C'est pourquoi, Dom Guéranger propose une association de fidèles « afin d'aider à la conservation et à l'accroissement de cet esprit ecclésial. Cette association invite aux pratiques suivantes :
o La participation à la messe solennelle (avec communion si possible) pour les dimanches et fêtes en s'efforçant de pénétrer et goûter le sens, à en connaître l'antiquité et l'institution
o L'attention aux chants avec l'aide de traductions sans faire autre chose pendant la liturgie que de mettre tout son soin à la suivre en s'y unissant profondément par l'intelligence et le sens spirituel.
o La fréquentation des offices divins, spécialement les dimanches et jours de fête sous la forme des Heures canoniales telles qu'elles peuvent être célébrées selon la règle canonique en certaines églises comme la Cathédrale. Les associés alimenteront leur prière personnelle en se servant des prières de l'Eglise comme expression de leurs sentiments.
o La pratique de l'oraison mentale en vue de l'union à Dieu.
Dom Guéranger termine son opuscule en évoquant les différents temps liturgiques et leur apport spécifique. Ce texte est tout à fait instructif sur l'esprit que dom Guéranger souhaite voir régner chez les fidèles qui veulent s'unir à son projet d'association. Ce qui compte avant tout, c'est le témoignage de l'Eglise comme Corps du Christ prolongeant en ce monde le mystère de son Incarnation.
VI. Les oblats et la vie monastique aujourd'hui
La théologie de Dom Guéranger reste plus que jamais d'actualité. Le mystère de l'Eglise est au centre des préoccupations chrétiennes actuelles. La constitution Lumen Gentium consacre un chapitre entier à la sainteté pour tous. Le laïcat retrouve toute sa place dans la vie de l'Eglise et l'engagement spirituel reste un élément tout à fait capital dans la vie de tout chrétien. On peut même dire qu'aujourd'hui, nous sommes attendus sur le terrain d'une pastorale spirituelle pour laquelle les oblats de nos monastères peuvent être très moteurs. Pour faire droit aux différents niveaux d'association avec le monastère, je voudrais souligner l'importance du congrès des oblats bénédictins proposé par le P. Abbé Primat qui eut lieu en septembre 2005. C'est la première fois que des oblats bénédictins se sont ainsi retrouvés autour du Primat à Rome. Le caractère universel de cette expérience va bien dans le sens de Dom Guéranger même si ce dernier ne préconisait guère les réunions d'oblats. Si l'oblature est importante aujourd'hui, c'est qu'elle permet à certaines sensibilités d'être ainsi affermies dans la foi pour annoncer l'Evangile de Dieu en Eglise. Nous attendons de ce Congrès qu'il ouvre des perspectives sur l'oblature en relation avec la doctrine de Vatican II. Solitude et communion. L'oblat aujourd'hui est marqué par le fait que son association à une communauté monastique est une démarche individuelle mais aussi un témoignage communautaire. On sait que l'équilibre est difficile à tenir mais il est capital, car il y a là l'un des problèmes majeures de nos sociétés occidentales : la dimension individuelle de tout engagement est mise en avant et par ailleurs, la recherche de la communauté est constante sans pour autant toujours aboutir. Cette tension peut s'exprimer en termes monastiques : solitude et communion. Les oblats, dans la souplesse mais aussi l'exigence de leur engagement peuvent heureusement en témoigner.
Communautés d'Eglise.
L'une des questions majeures de la vie des Eglises aujourd'hui est celle du témoignage et de la pertinence des communautés chrétiennes. Les paroisses ne suffisent plus à ce témoignage. Il est nécessaire que la vie des communautés locales soit complétée par des ensembles plus larges. Il me semble qu'il y aura là un point à creuser. La communauté monastique pourrait faire partie d'un regroupement de chrétiens sur un territoire donné avec un témoignage commun où prêtres, diacres, laïcs, religieux, religieuses et moines joueraient leurs rôles respectifs mais avec un souci commun de témoignage évangéliques qui passerait aussi par des temps de prière communs ainsi que des temps d'approfondissement de la foi et de partage fraternels.